Avec des acteurs majeurs de la lutte kurde, le colloque de la CNSK a marqué les esprits

Organisé dans un temps record, malgré la disparition tragique de l’une de ses organisatrices, Rojbîn, assassinée à Paris le 9 janvier 2013, “Regards croisés : territoires et peuple kurde, quel avenir pour le peuple kurde ?” a fait salle comble. Ce colloque s’est tenu le 13 novembre en salle Victor Hugo de l’Assemblée Nationale, à l’initiative de la Coordination nationale Solidarité Kurdistan (CNSK) qui s’est affirmée comme une référence quand il s’agit de parler et d’agir non pas “pour les Kurdes” ni “à la place des Kurdes” mais “dans une démarche de solidarité réciproque, d’intérêt commun” comme l’a dit dans son intervention Sylvie Jan, présidente de l’association de Solidarité France – Kurdistan.

Marie-Anne Chapdelaine, députée d’Ille et Vilaine, est venue quelques instants, malgré un emploi du temps chargé, saluer les organisateurs (et les participants d’Ille-et-Vilaine) : attentive à la question des droits de l’homme et à la question kurde, elle a exprimé sa solidarité “au nom d’un principe qui [lui] est cher : l’égalité des droits”.

La Coordination nationale Solidarité Kurdistan (CNSK)

Joël Dutto, animateur de la CNSK et du colloque, conseiller général honoraire, conseiller municipal de Marseille, en ouvrant le colloque, a présenté la “coordination” et ses objectifs :

elle fédère à ce jour toutes les associations qui dans notre pays soutiennent le combat du peuple kurde, y participent également, des organisations nationales et des organisations politiques. Notre ambition est d’élargir la CNSK à toutes les organisations qui militent, dans notre pays, pour le respect des droits humains.

Son action, connue et reconnue au-delà des frontières, dans les quatre parties du Kurdistan, a permis de réunir, à l’occasion de ce colloque, des personnalités dont les interventions ont été en tous points remarquables, parmi lesquelles il faut citer Salih Muslim, co-président du PYD (Union démocratique kurde – Syrie), Selahattin Demirtas, co-président du BDP (Parti pour la Paix et la Démocratie – Turquie), Ahmet Insel, professeur à l’Université Galatasaray d’Istanbul, maître de conférences à Paris 1, Laure Marchand, journaliste, Sylvie Boitel, avocate, Mehmet Ülker, président de la FEYKA (Fédération des Associations Kurdes de France) et Sylvie Jan.

Le colloque a rendu hommage aux trois militantes kurdes assassinées à Paris et notamment à Rojbîn de qui Joël Dutto a dit :

sa conviction, la force de ses mots étaient une arme redoutable. Elle était une grande diplomate Elle a porté la voix du peuple kurde auprès des principaux responsables politiques de notre pays. Elle était l’animatrice principale de la CNSK. Elle était notre amie, notre camarade et notre sœur.

La déclaration finale

La déclaration finale reprend toutes les questions évoquées, parmi lesquelles la politique de la France, jugée sévèrement, face à la question kurde :

nous attendons du président François Hollande, qui sera en voyage officiel en Turquie le 27 janvier prochain, qu’il prenne des initiatives significations en faveur de la reconnaissance identitaire du peuple kurde, au nom de l’égalité des droits, condition sine qua non pour avancer dans la voie d’une paix durable dans cette région du monde.

Telle est l’opinion générale qui s’est exprimée au cours de ce colloque.

Résolutions

Nous exigeons de la France, des Pays européens, de l’Union européenne, des Etats-Unis et des organismes onusiens :
1. Qu’ils condamnent toutes les atteintes aux droits fondamentaux dont sont victimes les Kurdes, en Iran, en Syrie et en Turquie.
2. Qu’ils reconnaissent la légitimité des revendications du peuple kurde :
a. reconnaissance identitaire garantie juridiquement et constitutionnellement, assurant par là-même la liberté de pensée et d’organisation
b. reconnaissance du droit à une autonomie démocratique
c. reconnaissance du droit à l’éducation dans la langue maternelle.
3. Qu’ils soutiennent le projet de résolutions de l’ONU demandant la libération de tous les prisonniers politiques, civils et combattants.
4. Que toutes les procédures judiciaires soient annulées, que tous les détenus politiques soient libérés et que tous les combattants puissent rentrer au pays et jouir de leurs droits civiques et politiques.
5. Qu’ils déploient tous les efforts diplomatiques pour obtenir la libération de tous les otages pris dans les populations civiles ou parmi les journalistes.
6. Qu’ils déploient tous les efforts diplomatiques pour obtenir de la Turquie une attitude constructive visant aux termes des négociations à une solution politique et équitable de la question kurde.

Nous demandons avec force :
-Que la France et l’Union Européenne s’engagent à prendre et à soutenir toutes les initiatives de paix dans la région kurde.
-Que l’Union Européenne conditionne la poursuite des accords de coopération avec la Turquie, à un règlement politique et pacifique de la question kurde.
-Que la France et l’Union Européenne prennent toutes les initiatives diplomatiques favorisant la libération de tous les prisonniers politiques dont Abdullah Öcalan.
-Que l’Union Européenne retire le PKK de sa liste des organisations terroristes.
-Que la France renonce au projet de loi portant sur la coopération policière avec la Turquie et que cessent toutes les mesures répressives envers les militants kurdes vivant en France.
-Que la France entreprenne tous les efforts nécessaires à l’aboutissement de l’enquête sur l’assassinat des trois militantes kurdes perpétré le 9 janvier 2013 à Paris.
-Que la France, l’Union européenne, et les pays européens assurent la protection des défenseurs des droits humains.

Nous soutenons :
1. “Le Comité international de soutien aux intellectuels de Turquie” mis en place par le Collectif VAN [Vigilance Arménienne contre le Négationnisme].
2. La campagne d’Amnesty international en faveur de deux journalistes kurdes arrêtés en Iran, et passibles de la peine de mort pour avoir dénoncé les atteintes aux droits de l’homme.
3. La campagne pour la reconnaissance du génocide arménien.

André Métayer