Erdoğan et Huduti tenus pour responsables de crimes de guerre et crimes d’État par le TPP

Déni du droit à l’autodétermination du peuple kurde, crimes de guerre et crimes d’État avec une responsabilité directe du Président Recep Erdoğan et du général Adem Huduti. C’est le verdict rendu par le Tribunal permanent des peuples sur la Turquie et les Kurdes, le 24 mai 2018 au Parlement européen à Bruxelles. Le Tribunal permanent des peuples (TPP) promeut le respect des droits fondamentaux en examinant les cas de violations graves et systématiques des droits de l’homme et des Conventions de Genève commis par des États ou des autorités non étatiques. C’est là une résistance au recul généralisé de ces droits et à leur violation répétée dans le monde. Dans son verdict le Tribunal Permanent des Peuples a reconnu comme crime d’État, les assassinats ciblés à Paris le 9 janvier 2013, de Sakine Cansiz, Fidan Dogan et Leyla Söylemez

déclare sur son blog Nils Andersson, éditeur–militant, cité comme témoin lors de la session du TPP des 15 et 16 mars 2018.

Nils Andersson, éditeur–militant

Nils Andersson est une figure, un combattant avec le livre comme seule arme, ce qui lui valut une vie mouvementée, la prison, l’exil, mais dont l’opiniâtreté fut exemplaire tout au long de sa vie. On peut citer un exemple entre mille : l’édition de “La Question”, d’Henri Alleg, militant du Parti communiste algérien, qui dénonçait les tortures auxquelles il avait été soumis dans le cadre de la guerre d’Algérie (1954/1962). Sorti le 17 février 1958 aux Editions de Minuit, l’ouvrage est saisi aussitôt et Nils Andersson, avec sa petite maison d’édition “La Cité Editeur”, installée à Lausanne, prend le relais, renouant ainsi avec l’époque de la Résistance, quand les maisons suisses prenaient le relais des ouvrages censurés en France. Cette victoire sera suivie de quelques autres. D’échecs aussi. La vie est un combat. Celle de Nils n’y échappe pas. Il n’est donc pas étonnant de le trouver aux côtés des Kurdes. Devant le TPP et lors d’une de la conférence de presse organisée à Paris le 5 janvier précédent, il a replacé le triple crime de la rue Lafayette dans la longue et triste histoire des crimes politiques perpétrés sur le sol français, qui se comptent par dizaines depuis la fin des années 50.

Opérations « Homo »

Le sens de ma déposition est de relever que de tels assassinats politiques s’ils ont un caractère exceptionnel par la gravité des faits, ne sont pas rares. Il paraît nécessaire en préalable de définir précisément la nature de ces actes criminels. Il s’agit d’assassinats ciblés, visant une ou des personnes à éliminer physiquement, en raison de leur fonction ou de leur rôle politique, de leur activité militante ou de ce qu’ils savent. Leur caractère ciblé fait qu’en France, depuis la guerre d’Algérie, situation dans laquelle ils furent une pratique usitée sous le couvert de « La Main Rouge », ces actions sont dénommées opérations « Homo », dans le sens qu’il ne s’agit pas d’un attentat aveugle, mais qu’elles visent une personne désignée.

Les assassinats ciblés ou opérations homo sont commandités par un État pour être commis dans les frontières d’un autre État. C’est là une pratique d’élimination physique des opposants ou adversaires politiques sans frontières, pratiquée par de nombreux États. Elle est officiellement tue et niée, cependant sa pratique n’est nullement une fake news, mais une cynique réalité. Ces opérations sont commanditées par des États et des services ou des officines parallèles qui agissent sous l’autorité d’un État. Ce sont donc des crimes d’État, ces crimes étant commis sur le territoire d’un État étranger, ils sont une violation du droit international et de la souveraineté territoriale de l’État où ils sont perpétrés. Et de conclure après une longue et intéressante démonstration,

les assassinats ciblés couvent un large champ idéologique et politique, mais force est de constater que le plus grand nombre de victimes sont des militants pour les droits sociaux et de libération de leur peuple comme Sakine Cansiz, Fidan Dogan, et Leyla Söylemez, militantes, victimes, le dossier judiciaire le démontre, d’un crime d’État commandité par l’État turc en violation du droit international et de la souveraineté territoriale de l’État français.

André Métayer