La Coordination nationale Solidarité Kurdistan a lancé le débat : quelle solution politique à la question kurde en Turquie ?

C’est dans la salle Lamartine de l’Assemblée nationale que s’est tenu le colloque organisé le 30 mai dernier par la Coordination nationale Solidarité Kurdistan[[La “Coordination” regroupe des associations comme Amitiés kurdes de Bretagne, Solidarité et Liberté, Mouvement de la Paix, Amitiés Corse-Kurdistan, Amis du Peuple kurde en Alsace et MRAP.]] sous le haut patronage de Jean Paul Lecoq, député membre de la Commission des Affaires Étrangères.

En ouvrant la séance, le député communiste de Seine-Maritime, connu pour ses prises de position courageuses et parfois iconoclastes quant il s’agit de la défense des droits des opprimés, est entré de suite dans le vif du sujet :

Les Kurdes représentent une nation, une nation sans État, comme les Palestiniens ou les Saharaouis. Mais qu’est-ce qu’une nation ? Ce terme est très délicat à manier tant il peut être manipulé pour exclure, et non pour rassembler… Aujourd’hui, le peuple kurde rassemble tous les critères d’un État-nation. Pourtant, sa volonté de devenir un État autonome est bafouée. En Turquie plus particulièrement, cette question est présentée comme un problème d’État qui pèse sur la politique intérieure. Le conflit kurde est donc un axe majeur à résoudre, tant il influence les gouvernants.

Rappelant “l’interminable lutte entre un pouvoir étatique intransigeant et un peuple assoiffé de liberté”, il déclare :

le pouvoir turc a tenté, à maintes reprises, d’assimiler les populations, mais jamais ce peuple n’a oublié ses racines, ses traditions et son histoire. Cette lutte devient alors emblématique de tous les peuples opprimés du monde, refusant d’être à la merci d’un pouvoir politique.

Dénonçant l’interdiction d’entrer à l’Assemblée Nationale de Nedim Seven, un militant kurde qui était invité à apporter son témoignage au cours de ce colloque, Jean Paul Lecoq a souligné qu’ici même, dans la maison des élus du peuple, la liberté n’est pas complète et a fait savoir qu’il adresserait une protestation indignée au Président de l’Assemblée nationale.

Quelle démocratie en Turquie ? Les clefs pour une solution politique de la question kurde ? Quelle politique conduisent, à cet égard, la France et les pays européens ? Telles sont les questions auxquelles ont répondu d’éminentes personnalités françaises et kurdes[[Bernard DORIN, Ambassadeur de France, Yavuz ONEN, Président d’honneur de la Fondation des Droits de l’Homme de Turquie (THIV), Meral BESTAS, Vice-présidente du BDP (Parti pour la Paix et la Démocratie), Didier LE SAOUT, Maître de conférence, Joël DUTTO, Conseiller général honoraire, Conseiller municipal de Marseille, François ALFONSI, Député européen, Sevahir BAYINDIR, Députée du BDP, Michel BILLOUT, Sénateur, membre de la Commission des Affaires étrangères, Renée LE MIGNOT, Co-présidente du MRAP, Pierre Laurent, Président du Parti de la Gauche européenne, Pascal-Ange TORRE, Professeur des Universités, André METAYER, Président de l’association Amitiés kurdes de Bretagne. N’a pas été autorisé à pénétrer dans les locaux de l’Assemblée nationale : Nedim SEVEN, militant kurde.]] , devant une assemblée attentive. Les négociations pour une paix durable, le droit à l’éducation et à l’enseignement en langue maternelle, la suppression de l’inscription du PKK sur la liste des organisations terroristes, une nouvelle constitution pour une Turquie démocratique et décentralisée, un changement de politique de l’Europe envers la question kurde, autant de sujets qui ont été exposés et débattus avec passion.

IMJ-_Dutto_JP_Lercoq.jpgA l’issue des débats a été adoptée une déclaration finale dans laquelle les congressistes demandent avec force :
-que les opérations militaires cessent et que les pourparlers qui durent depuis trois ans avec Abdullah Öcalan, leader du peuple kurde, débouchent désormais sur un processus de négociation ;
-que toutes les procédures judiciaires soient annulées, que tous les détenus politiques soient libérés et que tous les combattants puissent rentrer au pays et jouir de tous leurs droits civiques et politiques ;
-qu’une nouvelle constitution fondée sur les droits individuels et collectifs respecte les différences, favorise la démocratie participative et protège les différentes cultures, les différentes croyances et les différentes valeurs de la Turquie ;
-que soient discutées des propositions visant à mettre en place une gouvernance basée sur une réelle décentralisation qui reconnaisse l’identité kurde dans le cadre d’une Turquie moderne et démocratique ;
-que l’Union européenne, les pays européens, dont la France, appuient toute initiative en faveur de la paix et proposent en particulier un cadre de négociation pour un cessez-le-feu immédiat ;
-qu’elles soient attentives à la protection des défenseurs des droits humains.

André Métayer

CNSK-2011-05-30-ColloqueResolution_finale.pdf
CNSK-2011-05-Dossier_presse_Colloque_Quelle_solution_politique_la_question_Kurde_en_Turquie