La Coordination nationale Solidarité Kurdistan (CNSK) demande à être entendue par le gouvernement français

Une délégation de la CNSK s’est rendue en mars 2016 au Kurdistan de Turquie et en est revenue avec un rapport détaillé, témoignant de la situation de guerre civile, notamment à Diyarbakir dans le quartier historique de Sur et à Cizre, ville alors interdite, « l’épuration » n’étant pas alors terminée. Mais l’opinion publique n’était pas encore consciente de la mégalomanie du président de la Turquie, qui ne peut supporter la moindre opposition. Les Kurdes sont les premiers visés mais pas seulement : toute la presse est muselée et l’histoire de Zaman est significative à ce sujet. Le coup d’Etat, vite réprimé, lui donne l’occasion l’aller encore plus loin dans la répression, au point d’inquiéter les gouvernements des pays européens, dont la France.

La CNSK, forte de ses 19 membres, propose, dans la déclaration ci-jointe, une analyse de la situation et demande à être entendue par le gouvernement français.

André Métayer

Déclaration de la CNSK

La Coordination nationale “Solidarité Kurdistan” (CNSK) condamne la tentative de putsch qui s’est déroulée, en Turquie, dans la nuit du 15 au 16 juillet, et qui s’est soldée à Istanbul et à Ankara, par plus de 300 morts et plusieurs milliers de blessés. La population civile n’a pas été épargnée. Ce coup d’Etat manqué, étonnamment vite réprimé, sert les intérêts du président-dictateur Recep Tayyip Erdoğan qui, comme après chaque évènement sanglant, subi ou provoqué, a déclenché une série d’opérations répressives visant ses opposants politiques, en violation totale avec l’Etat de droit : quelque 50 000 personnes ont été suspendues, interpellées ou inculpées, notamment des militaires, des enseignants et des hauts magistrats, parmi lesquels des membres du Conseil d’État et de la Cour constitutionnelle. L’Etat d’urgence a été décrété et on parle ouvertement du rétablissement de la peine de mort.

La CNSK dénonce cette riposte disproportionnée du président-dictateur qui, sous prétexte de punir les mutins, poursuit son objectif maintes fois dénoncé par les forces démocratiques kurdes, celui d’écraser toutes velléités républicaines et laïques et d’établir un régime islamo-fasciste mettant définitivement fin à un régime parlementaire, à la liberté d’expression et à l’aspiration des populations à une autonomie de gestion locale. Cette politique totalitaire d’Erdoğan éclate au grand jour et embarrasse ses alliés européens, dont la France, qui ont eu l’imprudence de confier le soin de réguler le flot migratoire des populations fuyant les atrocités de Daesh à une Turquie flirtant avec ces hordes islamistes barbares et foulant aux pieds les libertés démocratiques.

La CNSK, qui a envoyé une délégation au Kurdistan Nord (Turquie du Sud-est) en mars 2016, a publié un rapport complet démontrant que le vrai coup d’Etat a été fomenté par le président dictateur Recep Tayyip Erdoğan lui-même qui, déclarant la guerre au peuple kurde, il y a plus d’un an, a donné ordre à son armée d’assiéger les villes kurdes. Couvre-feux arbitraires, arrestations de masse, assassinats quotidiens d’hommes, de femmes et d’enfants, déplacement de plus de cinq cent mille personnes, et des destructions à grande échelle de sites archéologiques millénaires classés au Patrimoine Mondial par l’Unesco, tel est le terrible constat. Un rapport de la Ville métropolitaine de Diyarbakir le confirme et le HDP (Parti démocratique des Peuples) rappelle que plus de 7 000 opposants kurdes sont toujours emprisonnés, parmi lesquels des députés, des maires, des maires adjoints, des cadres et militants du HDP. Les attaques contre les député-e-s du HDP et la levée de leur immunité parlementaire constituent un déni démocratique inacceptable.

La CNSK demande à être entendue par le gouvernement français. Il est dans l’intérêt de la France, mais aussi de la Turquie, d’affirmer une politique de fermeté à l’égard d’un homme à qui on ne peut donner “un chèque en blanc” et qui se permet de donner à la France des leçons insultantes pour tous les Français. Il est de la responsabilité de la France et des pays membres de l’UE de cesser toute connivence avec ce régime qui représente pour la Turquie et sa région un obstacle de plus à la paix et à la sécurité collective. C’est aux forces progressistes de Turquie qui mènent un combat admirable pour défendre les valeurs universelles et contribuer à instaurer une paix durable, que la France et les pays membres de l’UE doivent désormais apporter leur soutien.

Paris le 25 juillet 2016