L’Europe soutient le gouvernement turc en difficulté : les Kurdes en font les frais

Ce jeudi 4 mars plus de 300 policiers ont été mobilisés pour une vaste opération en 25 lieux de Belgique, notamment à Bruxelles, Anvers, Charleroi, Verviers, Namur ainsi qu’à Denderleeuw au siège de la télévision kurde Roj TV[[Emet depuis le Danemark mais a la plupart de ses locaux et ses effectifs en Belgique ; diffusée 24 heures sur 24, elle propose principalement en langue kurde des émissions d’actualité, des débat politique, des programmes culturels ainsi que des programmes pour enfants. La Turquie fait pression pour la faire interdire.]].

Une trentaine de militants et de journalistes kurdes sont en garde à vue parmi lesquels se trouvent des personnalités comme Zubeyir Aydar, ancien Président de l’IHD[[Association turque des droits de l’Homme]] de la région de Siirt, ancien député et ancien Président de Kongra-Gel[[Congrès du Peuple kurde]], Remzi Kartal, nouveau Président de Kongra-Gel et Eyyup Doru, représentant du BDP[[Parti pour la Paix et la Démocratie ; le BDP a remplacé le DTP dissout par la Cour Constitutionnelle de Turquie.]] en Europe ; tous les Kurdes vivant en Europe sont appelés à se rassembler à Bruxelles et à organiser des actions de protestation.

Eyyup Doru rapportait sur notre site la déclaration signée des deux co-présidents du BDP, Gültan Kışanak et Selahattin Demirtaş

Le gouvernement turc a déclenché contre notre parti, le BDP, Parti pour la Paix et la Démocratie, avec les rafles, les arrestations et les mises en détention, une politique plus répressive encore que celle du temps du régime militaire.

Ce même gouvernement est, par ailleurs, en grande difficulté avec son opposition :

C’est maintenant au cœur même de l’Etat que les tenants de l’ordre kémaliste affrontent pied à pied les partisans du gouvernement note l’OVIPOT qui s’interroge : verra-t-on demain l’armée et la police en venir aux mains ?

On peut donc se demander si les opérations déclenchées en France, en Italie et maintenant en Belgique ne visent pas à renforcer l’idée qu’il faut à tout prix éviter à l’allié turc le chaos qui serait préjudiciable aux intérêts économiques et géostratégiques européens et américains : l’alibi kurde arrive à point nommé pour réconcilier islamo-conservateurs et ultra-nationalistes. Tant pis pour la démocratie.

Ils se trompent ceux qui pensent pourvoir mâter ainsi la résistance kurde : les prisons vont devenir de véritables universités pour former les cadres de demain tant elles sont pleines d’avocats, de professeurs, de journalistes, de militants, politiques et associatifs, de jeunes et d’enfants.

André Métayer