“Ne touche pas à mes députés” : vives protestations kurdes en réponse au coup de force d’Erdoğan

“L’Etat turc court à toute vitesse vers un régime autoritaire inspiré de l’Allemagne nazie” déclare le Conseil démocratique kurde en France (CDK-F) en qualifiant de ‘coup d’Etat’ l’adoption par l’Assemblée nationale de Turquie, à la demande du tout puissant président Erdoğan, d’un amendement constitutionnel supprimant l’immunité parlementaire des députés. Eyyup Doru, représentant en Europe du Parti démocratique des peuples (HDP), interviewé par l’Humanité, dénonce cette manœuvre dirigée essentiellement contre les Kurdes et pointe la dérive autocratique du président turc :

quand Erdoğan aura ratifié la loi, cinquante et un de nos députés peuvent être convoqués par la justice du jour au lendemain. Or il ne faut pas s’y tromper. Le projet d’Erdoğan ne se résume pas seulement à l’écriture d’une nouvelle Constitution en vue d’instaurer une présidentialisation du pouvoir, il veut aussi construire un régime islamiste avec un système présidentiel « à la turque » pour l’encadrer. C’est pour cela que nos députés risquent des peines de prison ferme

Le HDP a par ailleurs publié une déclaration sur la levée de l’immunité parlementaire de ses députés.

Marche impressionnante des Kurdes de Rennes

Les Kurdes de Rennes, hommes, femmes, enfants, soutenus par les représentants d’organisations démocratiques et les amis du peuple kurde, ont marché lundi 23 à Rennes, de la dalle du Colombier à la place de la Mairie, tous défilant, sans débordement et dans la dignité, pour dénoncer la politique de la Turquie envers les Kurdes et notamment la dernière mesure, la levée de l’immunité parlementaire. A l’issue de cette manifestation Gülnur Karaduman, co-présidente du Conseil démocratique kurde de Rennes (CDK-R) a pris la parole en s’adressant au public en français :

le Président turc Recep Tayyip Erdoğan espère instaurer un régime présidentiel fort, ce qui lui permettrait de réaliser son ambition de devenir le Hitler du 21ème siècle… Loin de baisser les bras, les députés du HDP ont déclaré, à travers la voix des Coprésidents du parti, Selahattin Demirtas et Figen Yuksekdag, que la lutte ne faisait que commencer et que personne ne devait s’attendre à ce qu’ils acceptent « ce coup d’Etat qui impose ouvertement une dictature”.

Marche de protestation à Strasbourg

p5201940.jpgL’association des Amis du Peuple kurde en Alsace a apporté son soutien aux Kurdes de Strasbourg, qui ont organisé une marche de protestation le vendredi 20 mai de la place Kleber au consulat de Turquie. Plus de 200 manifestants étaient rassemblés. On pouvait lire sur les banderoles “Ne touche pas à mes députés, IRADEME, DOKUNMA”.

Rassemblement à St-Martin-d’Hères soutenu par vingt organisations iséroises

L’AIAK (Association iséroise des Amis des Kurdes) appelle au respect des libertés et des droits démocratiques en Turquie et invite la population à un rassemblement vendredi 27 mai à St-Martin-d’Hères :

les populations kurdes et leurs organisations politiques, syndicales, associatives sont victimes de massacres, crimes de guerre, atteintes contre les libertés, arrestations et poursuites judiciaires contre les partisans de la cause kurde, avocats, intellectuels, journalistes ou élus, considérés comme des «complices» des «terroristes». Une grave escalade anti-démocratique est en train de se mettre en place en Turquie

Inquiétantes pressions turques en France : après Redon, Le Creusot

Des pressions ont été exercées au Creusot pour faire interdire un débat public, organisé à l’invitation de l’Université populaire et du Collectif pour la Paix du Creusot en Saône-et-Loire, sur la situation du peuple kurde. Du jamais vu ! Comme à Redon. Et ce type d’action tend à proliférer : des affrontements se seraient produits, à l’instar de ceux de Redon, à Lyon et à Besançon. Cette conférence du Creusot, animée par l’association France-Kurdistan, membre de la CNSK (Coordination nationale Solidarité Kurdistan) devait se tenir le 19 mai dernier dans l’enceinte de l’IUT du Creusot. France-Kurdistan dénonce ces atteintes à la liberté d’expression dirigées contre des institutions françaises :

les responsables des associations locales turques, dont une connue pour son profil radical, ont remis au directeur de l’IUT, aux organisateurs de la conférence, aux autorités préfectorales de Mâcon et Autun, au commissariat du Creusot, à la mairie du Creusot et au Consulat de Turquie de Lyon, des courriers demandant l’annulation de la conférence. Ces courriers contenaient des menaces de troubles importants dans plusieurs endroits de la région, si cette rencontre devait avoir lieu… De toute évidence, ces signataires ont la volonté de faire taire les critiques sur le régime du président turc RT Erdoğan qui viole les droits humains… Les auteurs des menaces exprimées à l’occasion de la tenue de cette conférence, proches du Consulat turc, tentent d’imposer en France, dans leur région, le même autoritarisme et assimilent au terrorisme toutes celles et tous ceux qui dénoncent cette politique.

France-Kurdistan ne se laissera pas impressionner et une autre date est déjà programmée pour la tenue de cette conférence.

André Métayer