Erdoğan mauvais perdant : cinq semaines après les élections municipales en Turquie, il fait annuler le scrutin à Istanbul

En juin 2015, Erdoğan perd la majorité absolue à l’Assemblée. Il impose de nouvelles élections en novembre 2015. En mars 2019, il perd des grandes villes et n’accepte pas la perte d’Istanbul malgré le recomptage. Le 6 mai 2019, le Haut Conseil électoral, sous pression, annule le scrutin à Istanbul. Jusqu’où ira Erdoğan ?

Un reportage de Chris Den Hond et Mireille Court

Depuis le coup d’État raté de 2016 en Turquie, une vague de répression s’abat tous azimuts : sur des juges, enseignants, infirmiers, journalistes, élus… Dans la région kurde, le parti pro-kurde HDP gérait 102 mairies. 94 de ces maires ont été destitués et remplacés par des administrateurs, fidèles d’Erdoğan. Le 31 mars 2019, malgré la répression, le HDP vient de regagner 58 mairies. À Batman, le HDP obtient 66% des votes. Mehmet Demir est le nouveau maire. Mais jusqu’à quand ? À Diyarbakir, la capitale du Kurdistan de Turquie, la maire élue, Gültan Kışanak, avait mis en place un théâtre de la ville. Elle purge actuellement une peine de prison de 14 ans pour “terrorisme.” Le nouvel administrateur a licencié le personnel de la mairie, dont Elvan Koçer. Elvan joue aujourd’hui dans un petit théâtre privé. Erdoğan s’en prend aussi aux fonctionnaires de l’État. Sur les 125 000 fonctionnaires licenciés, seulement 42 000 ont été réintégrés. L’éducation nationale et le secteur de la santé sont particulièrement visés. Après les élections législatives de novembre 2015, le HDP obtient 59 membres à l’Assemblée nationale. Depuis, 23 ont été arrêtés, plusieurs sont en exil. Dersim Dag est la plus jeune députée de l’Assemblée. Elle est encore en liberté… pour le moment.

Dans ce remarquable reportage, Chris Den Hond et Mireille Court ont interviewé Mehmet Demir, nouveau élu maire de Batman, Elvan Koçer, artiste licenciée, Mehmet Atlihan, enseignant licencié et syndicaliste, Yüksel Tekin Avci, infirmière licenciée et syndicaliste et Dersim Dag, députée de Diyarbakir. Des témoignages remarquables d’authenticité d’une vie effroyablement difficile, contés avec une certaine retenue qui force l’admiration. Des témoignages pleins d’espoir aussi. A ne pas manquer

André Métayer