Bağlar (Diyarbakir), prison pour femmes, bloc 1, cellule 1

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Selon un rapport du l’administration pénitentiaire (Türkiye Ceza ve Tevkifevleri Genel Müdürlüğü), les prisons comptaient en mars 2012 132 369 détenus dont 4 818 femmes et 2 281 enfants, soit une augmentation de 300 % depuis 1999. La Turquie compte 370 prisons pour une capacité de 116 754 personnes, dont quatre prisons pour femmes et trois prisons pour enfants.

Six à sept mille personnes (hommes et femmes) sont détenues aujourd’hui pour “collusion avec le KCK” (Union des Communautés du Kurdistan) considérée par l’Etat turc comme la branche urbaine du PKK. En fait c’est tout un mouvement de démocratie participative qui est en marche, initié par le parti pro-kurde DTP (dissout et remplacé par de BDP), regroupant les formations politiques kurdes, y compris le Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK), des associations et des personnalités de la société civile.

Le KCK, un mouvement de démocratie participative

Toutes les assemblées de ville et de quartier ainsi créées, révèle Selahattin Demirtaş, député kurde, co-président du BDP, ont soutenu le DTP durant les municipales de 2009, en faisant notamment du porte-à-porte, et lui ont permis de remporter une large victoire. C’est donc en 2009 que l’AKP s’est rendu compte pour la première fois de la force d’un tel système. C’est pourquoi, au lendemain des élections, le 14 avril 2009, tous les dirigeants des dites assemblées, parmi lesquels des vice-présidents du DTP en charge de la coordination, ont été interpellés lors de la première vague d’arrestation.

Ces vagues d’arrestations et d’incarcérations n’ont cessé depuis car, dans cette implacable logique d’un premier ministre turc autocrate qui veut devenir président d’une Turquie “à sa main”, il est nécessaire de détruire ce modèle démocratique : RT Erdoğan ne peut tolérer cette capacité de la population à s’organiser jusque dans la rue. Toutes ces organisations qui, jusqu’à hier, menaient leurs activités sous ses yeux en toute légalité, ont été, du jour au lendemain, déclarées illégales.

La dignité de ces femmes détenues depuis de longs mois est intacte

A Bağlar (arrondissement de Diyarbakir), dans l’une des prisons pour femmes devant laquelle une délégation des Amitiés kurdes de Bretagne avait fait un sit-in le 24 mars 2010 pour protester contre ces incarcérations honteuses, s’entassent, dans des conditions d’hygiène lamentables, des militantes politiques et associatives, certaines depuis près de quatre années. Mais, comme le montre la photo ci-dessous, ces femmes conservent toute leur fierté et leur dignité.

André Métayer
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Debout de gauche à droite : Ehlam KACAR (Direction du BDP de Diyarbakir) ; Emettullah AKCARA (Direction du BDP de Silvan, condamnée à 8 ans d’emprisonnement) ; Zahide BESI (Assemblée des Femmes du BDP, détenue depuis 3 ans et 8 mois dans le cadre de l’affaire KCK) ; Zeynep BOGA (Assemblée des Femmes du BDP, détenue depuis 3 ans et 8 mois dans le cadre de l’affaire KCK) ; Besime KONCA (Comité exécutif BDP, Assemblée des Femmes du BDP, détenue depuis 3 ans et 8 mois dans le cadre de l’affaire KCK), Gülcihan ŞIMŞEK (Maire BDP de Bostaniçi, détenue depuis 3 ans et 8 mois dans le cadre de l’affaire KCK) ; Nihayet TASDEMIR (Assemblée des Femmes du BDP, détenue depuis 3 ans et 8 mois dans le cadre de l’affaire KCK) ; Mizgin ARI (Assemblée des Femmes du BDP, détenue depuis 9 mois dans le cadre de l’affaire KCK) ; Hasiye YAYIK (arrêtée lors d’une conférence de presse, condamnée à 10 ans d’emprisonnement) ; Taybet BELGE (Assemblée des Femmes du BDP, détenue depuis 1 an dans le cadre de l’affaire KCK).

Assises de gauche à droite : Jiyan ATES (étudiante à l’université de Dicle, détenue depuis 8 mois) ; Asiye ATILGAN (animatrice culturelle, détenue depuis 1 an) ; Gazel SUER (étudiante en philosophie, arrêtée lors d’une manifestation) ; Dirayet TASDEMIR (Conseillère du Maire de Diyarbakir, détenue depuis 3 ans 8 mois dans le cadre de l’affaire KCK) ; Zekiye MERCAN (détenue dans l’affaire KCK de Urfa, libérée récemment) ; Takibe TURGAY (Adjointe du président du BDP, condamnée à 10 ans d’emprisonnement) ; Semra ILBOGA (étudiante, détenue depuis 1 an).