Hommage de la ville de Paris à Sakine, Leyla, Rojbîn

“Cette plaque nous renvoie à notre devoir de mémoire. Elle n’efface pas notre tristesse mais nous encourage à poursuivre notre action : Oui nous avons promis de nous battre jusqu’au bout pour que la vérité éclate et que justice leur soit rendue”, a déclaré dans son intervention André Métayer, président fondateur des Amitiés kurdes de Bretagne, s’exprimant au nom de la Coordination nationale Solidarité Kurdistan (CNSK), lors de la cérémonie du 9 janvier, au cours de laquelle une plaque a été dévoilée. Il a également remercié la Ville de Paris et tous les élus qui ont pris la décision de rendre hommage à Sakine, Leyla, Rojbîn, trois militantes lâchement assassinées. Il a invité tous ceux ou celles qui couvrent encore cet acte criminel, au nom du secret-défense, à ne plus faire obstacle à la manifestation de la vérité : “Il y va de votre honneur. Il y va de l’honneur de notre pays”.

Des personnalités étaient autour de la tribune, écharpes tricolores en sautoir, honorant de leur présence cette cérémonie, aux côtés des membres des familles des victimes, Abdul Bari Saylemez, père de Leyla, et Metin Cansiz, frère de Sakine, qui prirent successivement la parole au nom des trois familles pour adresser leurs remerciements aux personnalités et à tous leurs amis kurdes et français réunis au terme d’une marche blanche, grave et silencieuse, qui les a conduits du siège du Centre de la Communauté démocratique kurde à Paris jusqu’au lieu du triple assassinat. Hélène Bidard, adjointe à la Maire de Paris représentant Anne Hidalgo, Rémi Féraud, sénateur, ancien maire du 10ème arrondissement de Paris et Alexandra Cordebard qui lui a succédé à ce poste ont, dans leur discours, rendu hommage aux trois militantes assassinées et affirmé, chacun à sa manière, que la plaque apposée au 147 rue La Fayette montre la volonté de la Ville de Paris de ne pas oublier, de rester solidaire avec le peuple kurde et de demander que justice soit rendue : “nous continuerons d’exiger que la justice soit rendue aux côtés de leurs familles et des asso du mvt kurde” a twitté Hélène Bidard.
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L’affaire est relancée

Des éléments nouveaux peuvent en effet permettre de relancer l’action judiciaire, qui s’est éteinte avec le décès de l’assassin présumé. Ils ont été révélés lors de la conférence de presse du 5 janvier. “L’affaire n’est pas terminée, elle ne peut pas être terminée. dès lors qu’on a identifié le MIT (les services secrets turcs) comme ayant une participation” a déclaré Me Antoine Comte, l’un des avocats des familles des victimes, approuvé par Nils Andersson, ancien éditeur, écrivain, militant altermondialiste, Nursel Kiliç, porte-parole du Mouvement des Femmes kurdes d’Europe et membre du Congrès national du Kurdistan, une des plus proches amies de Rojbîn avec Sylvie Jan, qui, au nom de la CNSK, a exprimé la volonté commune pour que “ce crime d’Etat ne sombre dans l’oubli” et qui a annoncé un prochain rendez-vous au cours duquel le Tribunal permanent des peuples aura, les 15 et 16 mars prochain à Paris, à juger des crimes de guerre commis par la Turquie.

Non, la mobilisation n’a pas faibli. Cinq ans ont passé et c’est encore plus de 10 000 personnes qui sont venues de France et d’Allemagne, ce samedi 6 janvier, crier leur colère et exigé “vérité et justice”. Une délégation des Amitiés kurdes de Bretagne était présente. Non, la mobilisation n’a pas faibli, non plus, le 9 janvier. Dans son intervention, Agit Polat, chargé des relations extérieures du Conseil démocratique kurde en France l’a souligné en rappelant que ce triple assassinat a eu lieu il y a cinq ans, jour pour jour et que « le peuple kurde qui connaît la vérité exige maintenant la justice. Le temps presse et les exactions continuent. Aujourd’hui, les escadrons de la mort envoyés par Erdoğan continuent à circuler en Europe pour cibler les Kurdes » en citant les tentatives d’assassinat contre des personnalités politiques kurdes à Hambourg et, il y a deux jours, un mitraillage, sur une autoroute allemande près de la ville de Düren, visant Deniz Naki, un footballeur connu pour ses positions pro-kurdes.

Le Président de la République se doit de recevoir les familles des victimes sans délai

Il revenait à Nursel Kiliç d’évoquer la mémoire de ses trois amies et de saluer le combat mené par les associations telles que Femmes Solidaires, Marche mondiale des Femmes, le SKB, la CNDF et les organisations féministes de la planète “qui ont porté avec nous ce combat contre ce crime politique que nous définissons de féminicide”.

“Maintenant que nous connaissons la vérité, justice doit être rendue” s’est écriée avec force Nursel Kiliç :

La venue de Recep Tayyip Erdoğan la veille de la commémoration du triple assassinat politique est un outrage aux valeurs universelles que porte la France, mais aussi un outrage à l’égard du peuple kurde et de ses amis. Monsieur le Président de la République Emmanuel Macron ne doit pas sacrifier la justice à la raison d’Etat et à ses intérêts politico-économiques avec la Turquie. La France se doit de juger et de condamner les auteurs d’un crime politique et ainsi d’en finir avec l’image d’un pays d’impunité pour les crimes politiques. Dans le cadre de l’avancée du dossier, le Président de la République se doit de recevoir les familles des victimes sans délai.