Abluka (« Suspicions ») d’Emin Alper, en avant-première au cinéma à Loudéac et Saint-Brieuc

Présenté au festival de Douarnenez cet été, le film Abluka (« Suspicions ») d’Emin Alper – réalisateur de Derrière la colline (Mention Spéciale & Prix du 1er Film, Berlin 2012) – sortira dans les salles en France le 23 novembre prochain. Mais il sera diffusé [rouge]en avant-première mercredi 5 octobre à Loudéac au cinéma Le Quai des Images et jeudi 6 octobre à Saint-Brieuc au Club 6[/rouge]. Les projections seront suivies d’un débat avec Jacques Tréhot, psychiatre et Jean-François Polo, professeur en sciences politiques à l’université de Rennes.

Un thriller psychologique haletant

Synopsis sur Allociné : Istanbul, dans un avenir proche. Kadir purge une peine de 20 ans de prison et se voit proposer une libération anticipée. En échange, il s’engage à aider la police dans la traque contre le terrorisme et accepte d’être leur informateur. Une fois dehors, Kadir reprend contact avec son petit frère Ahmet, chargé par la mairie d’abattre les chiens errants de la ville. Mais la situation s’envenime. La violence qui entoure les deux frères et la pression de leurs autorités les entraînent dans une spirale infernale. Une allégorie kafkaïenne.

L’auteur dit, des héros qu’il met en scène :

les personnages du film ne sont pas simplement des instruments du système ou les victimes d’une atmosphère violente. Ils font certains choix et ont des responsabilités, ce qui pour moi rapproche le film de la tragédie. Les personnages sont vulnérables, ils ont des faiblesses qui les conduisent à des fins tragiques.

Un film difficile à définir

Ce film rend Althéa Karadağ (Kedistan) perplexe :

le long-métrage nous projette dans un Istanbul chaotique avec des souffles d’explosions, des tremblements du sol, des déflagrations et des sirènes de police. Les check-points omniprésents contribuent à ce quasi état de siège de la ville. Ainsi nous nous demandons si Kadir qui a vécu 20 années en prison ne commence pas sa liberté conditionnelle dans un autre type d’emprisonnement. Ce huit-clos au cœur d’un régime totalitaire nous laisse perplexe. Au fur et à mesure, les personnages tombent dans la schizophrénie sur fond de terrorisme, point sur lequel nous ne pouvons passer puisque toute l’intrigue tourne autour du sujet. Le film tourné en 2013 commençait à entrevoir l’évolution politique actuelle.

« Abluka, sa Turquie va craquer »

Erwan Desbois écrit dans ACCREDS :

toute la folie d’un pays concentrée dans l’esprit de deux frères : le réalisateur Emin Alper s’empare de l’état d’urgence de la Turquie, sur le point d’exploser à force de haine et de violence rentrées, et nous le fait éprouver en produisant un geste cinématographique intense – trop peut-être.

Emin Alper, scénariste et réalisateur

Emin Alper, scénariste et réalisateur né en 1974 à Konya en Turquie, est diplômé en économie et en histoire et enseigne au département des Sciences sociales et humaines de l’Université technique d’Istanbul. Son premier long-métrage, “Derrière la colline”, eut un immense succès.

Invité à Douarnenez, il n’a pu venir, victime des purges que le président RT Erdogan a déclenchées dans sa grande paranoïa. Interpellé, Emin Alper a fait un court séjour en prison avant d’être relâché avec interdiction de quitter le territoire de Turquie. Il espère cependant pouvoir obtenir l’autorisation de venir en France pour la sortie de son film.

André Métayer

Abluka (Turquie, 2015), un film d’Emin Alper avec Mehmet Ozgur, Tulin Ozen, Ozan Akbaba, Mustafa Kirantepe. Durée : 114 minutes.