Demirtaş reste en prison, Öcalan est en isolement total depuis 2016, les grèves de la faim illimitées commencées dans les prisons turques vont s’étendre

Le président Erdoğan nargue ses homologues européens et se moque des institutions européennes. Sa seule obsession est de “génocider” le peuple kurde, comme ont pu le faire, cent ans plus tôt, les chefs du parti des Jeunes Turcs avec les populations arméniennes. Seuls les moyens employés diffèrent. Il n’hésite pas à étendre sa répression au-delà des frontières avec son ingérence tant en Irak qu’en Syrie, poursuivant les Kurdes toujours sous le prétexte fallacieux de lutter contre le terrorisme. Un des moyens employés en Turquie est de ratisser large, en remplissant les prisons de tous ses opposants et de mettre au secret les chefs les plus charismatiques. Le peuple kurde ne peut rester sans réagir.

Demirtaş reste en prison

Selahattin Demirtaş va rester en prison : la justice turque aux ordres du président dictateur a rejeté l’appel de la condamnation à 4 ans et 8 mois d’emprisonnement pour “propagande terroriste”. La justice a fait preuve, en l’occurrence, d’une diligence inhabituelle, qui permet à la Turquie d’ignorer l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) la sommant de mettre fin dans les plus brefs délais à la détention provisoire de M. Demirtaş dans le cadre son principal procès, celui pour lequel il est passible de 142 années de prison. Le HDP dénonce, dans un communiqué, une décision politique, prise sous la pression du président Erdoğan. “Il s’agit clairement d’une violation de la Constitution et de la Convention européenne des droits de l’homme”, ajoute le texte signé par les co-présidents du parti, Pervin Buldan et Sezai Temelli. La justice démontre une fois encore, qu’elle n’est pas indépendante et que la Turquie n’est plus, depuis longtemps, un Etat de droit.

Isolement total d’Abdullah Öcalan depuis septembre 2016

[
Abdullah Öcalan ->674] a été enlevé et remis à la Turquie en février 1999, dans le cadre d’une opération menée conjointement par les services de renseignement américains, britanniques, israéliens, allemands, russes et grecs. Depuis, il est détenu sur l’île-prison d’Imrali. Il est un interlocuteur incontournable pour trouver une solution politique à la question kurde. Il l’a démontré : c’est lui, en effet, qui a initié les différents processus de paix entre la Turquie et le PKK, de 2008 à 2015. Mais on a vu aussi le double jeu d’Erdoğan qui a rompu unilatéralement les négociations en avril 2015. Depuis Abdullah Öcalan est à nouveau soumis à un régime d’exception : l’isolement total. On se croirait au Moyen-âge avec les lettres de cachet et les cachots de basse-fosse. Alors que ses avocats étaient déjà interdits de visite depuis 2011, les membres de sa famille n’ont pu le voir qu’une seule fois en septembre 2016.

Appel à la grève de la faim à compter du 6 décembre 2018

Cette situation d’isolement total constitue une violation de la Convention des Nations-Unies contre la torture que la Turquie à ratifiée en 1988. Elle est par ailleurs contraire à la Convention européenne des Droits de l’Homme ratifiée par la Turquie en 1954

proteste le Conseil démocratique kurde en France qui relaie l’appel à une grève de la faim illimitée.

Pour rompre le silence de l’Union européenne, du Conseil de l’Europe et du Comité pour la Prévention de la Torture, la famille d’Öcalan, ses avocats, ainsi que les organisations kurdes au Kurdistan, en Turquie et en Europe, ont appelé à une grève de la faim illimitée. Des députés kurdes et plus de 10 000 prisonniers politiques dans les prisons turques ont déjà répondu à cet appel. La diaspora kurde en Europe refuse de se taire face à l’isolement et à la torture imposés au leader du mouvement de libération kurde. Le 6 décembre 2018, dans toute l’Europe, commencent des grèves de la faim pour briser l’isolement. Nous appelons tout-e-s les tenant-e-s de la démocratie à nous soutenir dans cette lutte contre le fascisme !

André Métayer