Kadir Dilsiz, octobre 2012

En prison de type F, à Izmir, depuis le 9 juillet 2008, Kadir poursuit son combat pour rester vivant et garder sa dignité. Il n’a exécuté que 4 ans et 9 mois des 11 ans et 3 mois auxquels il a été condamné injustement pour “appartenance supposée au PKK” (Kadir, un “Kurde breton” détenu à Izmir dans une prison de type F, clame son innocence). Izmir se trouve à 1200 kms du village de sa famille : depuis 2 ans, il demande son déplacement vers Urfa plus proche de sa famille. Seuls, sa femme et son plus jeune fils lui rendent visite mais, étant donnés la distance et le coût des transports, une visite ne peut être possible qu’au maximum deux fois par an. Il vient de renouveler sa demande mais il sait qu’elle a peu de chance d’aboutir.

Depuis un an, les courriers se font rares. Sa participation, à plusieurs reprises, à des grèves de la faim lui a valu plusieurs peines d’isolement d’un mois, périodes où il ne peut ni envoyer de courriers, ni en recevoir, un mois sans visite, un mois de solitude, privé de tout. La prison se trouvant dans une forêt, il évoque souvent “les coccinelles, papillons, oiseaux et insectes qui visitent les cellules“. Cet été, la chaleur a été insupportable : “50°, il fait tellement chaud, impossible de dormir. Je mets de l’eau dans une petite boîte et je la place sur le bord de la petite fenêtre pour les oiseaux mais elle s’évapore en quelques heures“. Enfermé, coupé du monde, il écrivait en avril : “la chose la plus difficile est de sentir l’arrivée du printemps … je ne vois pas le vert de la nature, mais malgré tout, j’aime l’odeur de cette saison qui donne un sentiment d’ivresse“.

Il souffre de problèmes visuels, aggravés par des séjours prolongés dans la pénombre. Il a déjà été opéré et, en fin d’année, il devra subir une seconde opération. Les lunettes que nous avons pu lui envoyer lui permettent de lire et d’écrire. Une blessure au bras l’a empêché d’écrire et de dessiner. Cette capacité lui revient peu à peu.

Les contacts avec ses codétenus paraissent beaucoup plus difficiles qu’il y a un an. Il tente de “soutenir les nouveaux camarades : ils ont souvent des problèmes mais, comme tu ne peux pas les voir ni parler avec eux, tu essaies de leur écrire“.
Ses recours près de Cour Européenne des Droits de l’Homme ont été rejetés. Il a déposé une nouvelle requête près de la Grande Chambre de la CEDH.

Il se plonge, tant qu’il le peut dans la lecture et étudie beaucoup. Sur sa dernière lettre, il parle de Murray Bookchin, son “écrivain préféré”. Il parvient à se tenir au courant de l’actualité internationale ; les journaux turcs et la télé turque sont ses seuls liens avec le monde extérieur. Nos messages et courriers lui sont très précieux : les cartes, les photos que nous lui avons envoyées, les uns et les autres, tapissent sa cellule et l’amitié que nous lui montrons ainsi le maintient en vie.

Françoise Plissoneau

Amnesty international groupe de Redon