La mort de deux jeunes Kurdes tués à Lice par les forces de l’ordre menace le processus de paix

La tension est très forte au Kurdistan de Turquie. Deux jeunes Kurdes ont été tués samedi 7 juin par des forces de l’ordre à la suite d’une série de manifestations qui durent depuis plusieurs semaines dans la province de Diyarbakir pour empêcher la construction de nouveaux postes militaires. Il faut dire que le gouvernement AKP a, en dépit du processus de paix, accéléré la construction de casernes militaires : 341 nouvelles casernes militaires ont été construites en 2013 dans la région kurde, venant s’ajouter aux 1 300 casernes déjà existantes. Les forces de sécurité tentaient de déloger, en vain, des centaines de personnes très déterminées rassemblées à Lice, commune qui a voté, lors des élections de mars dernier, à 88,76% pour le BDP. Rappelons aussi que c’est à Fis, un des villages de Lice, que fut créé le PKK en 1978 par Abdullah Öcalan et un groupe de jeunes militants dont Sakine Cansiz, assassinée à Paris le 9 janvier 2013.

Les affrontements ont été violents, même lors des funérailles des victimes, la police tirant des gaz lacrymogènes et faisant usage de canons à eau, les manifestants lançant des pierres et des bouteilles enflammées.

Cette situation a mis fin, de facto, au cessez-le-feu

Les HPG (forces armées du PKK), qui avaient commencé en 2013 leur retrait du territoire turc, ont réagi sous la forme d’un communiqué :

le mouvement kurde pour la liberté maintient, depuis un an et demi, une politique de non-intervention. L’administration du Parti de la justice et du développement – AKP, au pouvoir – en a profité pour construire de nouvelles casernes, de nouveaux barrages, de nouvelles routes utilisées à des fins militaires. Cette situation a mis fin, de facto, au cessez-le-feu.

Le BDP demande au gouvernement turc de respecter ses engagements

La représentation en Europe du parti légal pro-kurde BDP (Parti pour la Paix et la Démocratie) a réagi vigoureusement :

nous condamnons la mort de deux manifestants kurdes, tués par les forces de l’ordre de l’Etat turc alors qu’ils prenaient part à une manifestation pour protester contre la construction de nouveaux postes militaires et de barrages destinés à des fins sécuritaires dans la région du Kurdistan. Le gouvernement turc a, depuis le mois de janvier 2013, entamé une négociation avec le président du PKK, qui a abouti à un cessez-le-feu. Mais au lieu de respecter ce cessez-le-feu et de procéder à des réformes constitutionnelles afin de trouver une solution pacifique à la question kurde, le gouvernement a au contraire profité de la situation de calme découlant de cet accord pour renforcer l’installation de nouvelles casernes militaires dans la région. Cette manière d’agir souligne la contradiction de l’Etat concernant le processus de paix en cours.

S’adressant au chef du gouvernement, il lui demande solennellement de respecter les engagements pris lors des réunions de négociations avec le président du PKK, Abdullah Öcalan, et à ne pas saboter le fragile processus de paix en cours. Le BDP en appelle aussi à l’Union Européenne pour qu’elle exige de la Turquie le respect des engagements prévus dans le cadre des résolutions en tant que pays candidat à l’Union européenne.

André Métayer